Le thé marocain, à l’instar des mouvances mondiales qui ont accompagné la propagation du thé dans le monde, a sa propre histoire et son propre timbre, qui permet de mieux comprendre comment tout un peuple s’est approprié la boisson miracle, et en a fait son symbole culturel. Ainsi, revenons quelque quatre siècles dans le temps...

Un cadeau royal

L’histoire rapporte qu’à la fin du 17e siècle, le thé fut introduit au Maroc à la cour du Sultan Moulay Ismaïl (1672-1727) par la reine Anne d’Angleterre (1665-1714) désireuse de libérer des prisonniers de guerre britanniques. Bien qu’à l’origine, plusieurs fatwas interdisaient le thé selon la proscription islamique du fermenté, peu à peu, le thé fait de plus en plus partie des cadeaux que les visiteurs étrangers apportent à Moulay Ismaïl.
Et si au 18e siècle, les missionnaires, diplomates et corsaires anglais et hollandais consomment du thé en abondance, son goût raffiné séduit la cour et les autres sphères du makhzen. Le thé devient une institution royale, et vers la fin du siècle, il fait l’objet d’un véritable cérémonial.

La guerre de crimée

Avec la Guerre de Crimée, en 1854, les Anglais à la recherche de débouchés pour leur thé après le blocus de la mer Baltique, se tournent vers le Maroc, ouvrant la voie à une démocratisation du thé dans le royaume.
En 1870, alors qu’une grave crise alimentaire secoue le pays dont les importations régressent massivement, le thé reste l’une des rares denrées accessibles. Il devient même un symbole de l’épreuve en ces périodes troubles : les Anglais inondent le marché de thés de qualité médiocre qui deviennent pour les Marocains une nourriture de substitution accompagnée de dattes et de figues

Une boisson nationale

A partir de 1930, naturellement, d’importantes familles de commerçants et négociants privés, avec à leur tête Hadj Hassan Raji “Moul Atay”, commercialisent le thé et contribuent au développement et à la distribution du thé dans le pays.
Au début des années 60, l’Etat prend le monopole du conditionnement et de la distribution du thé en créant l’Office National du Thé et du Sucre (ONTS).
Enfin, en 1994, l’Etat décrète la fin du monopole de l’ONTS et le marché s’ouvre à nouveau. Cette date clé marque le retour dans le secteur des groupes privés, dont certains ont largement contribué à faire du thé la boisson nationale du Maroc. La diversification des acteurs est source de créativité, pour le plus grand plaisir gustatif des consommateurs de thé Marocain.